Ben quoi ? Je vois de plus en plus de 64 sur des vitres de bagnoles et pourquoi pas 33 ? Lacanau, Hourtin, Carcans, ça parle aussi un peu non ? Donc 33 j’ai dis. D’abord parce que c’est le département de la Gironde et puis parce qu'il reste 33 jours avant le départ, enfin un peu moins maintenant. Quand on prépare la Trans Aq’, on compte les jours, c’est comme ça, c’est presque inéluctable. D’ailleurs, on compte tout sur la Trans Aq’, le poids, les calories, les kilomètres et pour certains comme moi, le temps. Le temps avant, le temps pendant et après… rien sans doute, je me demande ce que je ferai du temps dont je disposerai, angoissante question.
Rien n’est jamais gagné. Dans la vie, au boulot ou dans son couple et bien évidemment en matière de sport. L’ultra ne déroge pas à cette règle. Et le foot non plus. Supporter des Girondins de Bordeaux, enfin plus sympathisant que réellement supporter au sens strict. Je me vois mal agiter des banderoles en hurlant « Allez Bordeaux !» « Mais pète lui la jambe bordel ! » Enfin vous voyez le tableau quoi. Habitant près du parc des princes, je suis passé plusieurs fois devant en courant les jours de match et cela a eu pour effet de détruire l’image positive que j’aurai pu avoir du supporter de base et de me vacciner contre ce type de hobbies. Bon à Bordeaux c’est différent mais quand même, je connais aussi les « OM on t’enc… ! » à Chaban Delmas et autres messages de cordialité du même genre. C’était l’époque bénie où l’on étrillait l’OM à domicile sans trop forcer, quand Laurent Blanc jouait sur la canebière, c'est dire si cela date un peu.
Pour en revenir aux fameux Girondins de Bordeaux, ils se sont vus trop beaux, trop tôt avec les 9 points d’avance à la trêve hivernale. Mais voilà, en sport, le manque d’humilité se paye souvent cash. Faire preuve d’abnégation, respecter l’adversaire ou l’épreuve elle-même est à la base de tout. Aujourd’hui, les girondins de Bordeaux pointent à la 6ème place du classement à 14 points du leader l’OM... Ils ont quasiment tout perdu en quelques mois avec un entraîneur qui a succombé aux sirènes des louanges quasi-unanimes du milieu et certainement des médias mais également des joueurs qui ont bien souvent lâché dans leur tète. Le gâchis est énorme mais quelque part mérité. Et je suis déçu car l’aventure était belle et exaltante.
Mes échecs m’ont appris qu’il ne fallait jamais vendre la peau de l’ours. Je sens que vous finissez par vous dire « Il commence à nous courir avec ses échecs ». J’en conviens certes mais ce lieu presque anonyme a pour fondement les quelques baffes prises par son auteur dans sa quête d’épopées sportives. On va dire pour clarifier l’explication que l’auteur, c’est moi.
J’ai donc connu cette phase où tout était possible jusqu’à l’étape ultime, à savoir l’abandon. D’ailleurs celui-ci est souvent précédé par des courses finies à l’arrache et là c’est le piège. On finit par se dire, « finalement, même sans m’entraîner, je vais au bout. » Un peu comme les girondins de Bordeaux « on commence à jouer comme des quiches mais on gagne donc pourquoi s’inquiéter plus que ça ? ». Oui mais non ! Ça c’est la phase 1. La phase 2, c’est l’abandon ou la perte du match. Bien souvent le mental ne comprend pas pourquoi le corps ne suit plus et il lâche. En ultra comme en foot d’ailleurs, il faut rester humble, respecter l’épreuve et se préparer aux difficultés. Comme lieu commun, on fait difficilement mieux.
Rien n’est jamais gagné je disais en préambule. La Trans Aq’ sur le papier est une affaire simple. Des étapes pas trop longues que l’on finirait en temps normal puisqu’elles correspondent à des trail moyenne distance. Même l’étape longue reste du domaine du raisonnable, entre 55 et 60 km à 4,5km/h de moyenne, pas de quoi effrayer le trailer de base que je suis. Mais voilà, l’accumulation des étapes, le sable, la chaleur, le manque de récupération, le manque de nourriture sont autant de facteurs qui augmentent la difficulté de l’épreuve. Et au final, c’est loin d’être une balade de santé. Pourquoi je vous dis ça ? Eh ben parce que je me répète inlassablement ces quelques règles voilà tout.
Pomper bêtement un plan alimentaire sur des coureurs surement meilleurs que moi, qui ont des besoins et des gouts certainement différents n’est pas la meilleure des façons de réussir. Car tous les détails vont compter. Je mangerai et je boirai des trucs testés et surtout équilibrés. Mon tableau alimentaire est presque prêt. J’ai essayé de ne rien négliger. Il comporte une bonne base de plats lyophilisés, des boissons énergétiques pour la course et la récupération ainsi que pas mal d’aliments plaisirs. J’ai augmenté sérieusement le nombre de calories notamment en J1 et J3/4. Pourquoi ces jours ? Tout simplement parce que ce sont des jours où on mange des trucs qu’on n’aura pas à porter. Lundi, je peux charger le petit déjeuner car il sortira de suite du sac. Mercredi et jeudi, je récupère le petit sac pour les 3 jours suivants donc je vais charger au maximum la récupération du mercredi après l’étape longue et celle du jeudi dans la journée. Ces moments seront l’occasion de grignoter, d’absorber un max de calories et de boissons de récupération.
Récemment, une partie de mon rêve s’est brisé lorsque j’ai appris l’abandon d’Anne-Paule à la Trans Aq’. La cause, l’accumulation de blessures : tendinites aux TLF, entorse du pied, pincement de vertèbres et la dernière en date, une algodystrophie du pied. C’est un truc barbare très long, compliqué à soigner et surement consécutif à son entorse de janvier. Mais le résultat est là, je serai seul début juin à Montalivet. Je vais certainement faire la connaissance de 2 gentils trailers avec qui je passerai des nuits agitées par les levés urinaires et/ou les ronflements sonores même si tout ceci se fait dans le plus sympathique des esprits.
Alors que la Trans Aq’ se construisait autour de ça, je me retrouve un peu tout nu à essayer de retrouver l’envie de la vivre autrement. Si je vais au bout, je serai surement très heureux mais ce ne sera pas pareil… Pourtant, bizarrement, au départ la Trans Aq’ était une aventure que je voulais vivre seul parce qu’elle me correspondait complètement en terme d’approche de la course à pied. Cette approche avait changé avec l’inscription d’Anne-Paule et aujourd'hui je dois revenir à un truc un peu plus égoïste. Rien n’est jamais gagné non, l’ultra avant même d’être couru reste un truc très aléatoire du fait de l’énorme préparation physique et mentale qu’il implique. Le corps est une machine formidable aux ressources insoupçonnées mais reste fragile. Là encore, je reste prudent car tout peut aussi s’écrouler pour moi à quelques semaines du départ.
La marge dont je dispose n’est pas importante. Je l’ai vu sur le trail de Cheptainville. Je suis passé de l’état de trailer euphorique en route pour une perf sympathique à celui de loque humaine vidée de toute substance en l’espace de quelques kilomètres. Incroyable comme sensation. Je ne sais toujours pas dire si cet effondrement est physique ou mental. Depuis l'écotrail, je sens que j'accuse le coup. Je pars m'entraîner avec moins d'entrain, les sorties sont plus dures et une espèce de lassitude s'installe. C'est peut-être un signe de sur-entraînement, peut-être le contrecoup de l'abandon d'Anne-Paule. J'ai aussi toujours mal aux genoux. Je sens que je suis fatigué et je n'arrive pas à récupérer. Je vais faire une cure d'Isoxan Endurance dans un 1er temps. Je m'étais inscrits aussi au trail des Cerfs le 16 mai sur le parcours du 35km. Il est fort probable que je bascule sur le 20 histoire de ne pas me flinguer. Incertitude encore et toujours. Dans ce type d'activité, on est toujours sur le fil du rasoir, il faut surfer entre le "en faire trop" et le "pas assez".
Il paraîtrait aussi que je manque de protéines alors j’en avale en grosses quantités depuis quelques jours. "Il faut reconstruire vos muscles Monsieur FERRER !" me disait il y a peu une nutritionniste en regardant une de mes semaines alimentaires. En même temps, les proteines, ce n'est pas trop compliqué à trouver, il y en a quasiment partout. En fait, je mangeais trop de sucres, lents pour l'essentiel, mais trop de sucres quand même. L'ajustement n'est pas trop difficile à faire et j'espère que cela sera positif.
Voilà, un petit article pour ne pas dire grand chose et qui part un peu dans tous les sens. Mais il est à l'image de ce blog, le vécu d'un coureur qui se prépare à affronter une grosse épreuve. J'aimerai vivre normalement cette approche mais l'expérience et l'incertitude font que ce n'est pas possible.
La suite au prochain épisode... enfin peut-être.